Le Roi de Fantastiqua avait divisé son royaume afin de léguer deux parcelles de même superficie à ses deux fils. La guerre se préparant, chaque frère avait érigé un château sur ses terres.

Kanoë avait hérité de terres situées à l’Est de Fantastiqua. C’était une contrée verdoyante où il faisait bon vivre. Elle était traversée par de nombreux cours d’eau et une rivière. La plaine et la forêt succédaient aux montagnes rocailleuses. C’était un lieu très fertile au climat et relief très diversifiés mais demeurant harmonieux. Chaque espèce y trouvait son compte. Les forêts abritaient elfes, fées et autres espèces, les plaines étaient idéales pour les humains et les montagnes apportaient l’abri nécessaire aux phœnix griffons et autres créatures ailées.
C’était en ce lieu que Kanoë avait décidé de s’installer avec ses troupes. Il avait fait construire son château au pied des montagnes, entre les plaines et les bois. Ainsi, il ne lésait aucune créature de son armée ; elles y avaient toutes accès, quelque soit leurs particularités physiques, sans aucune difficulté. En effet, Kanoë voulait le meilleur pour ses hommes, il prenait soin de tous et assurait ainsi l’harmonie de ses troupes. Les guerriers qui le souhaitaient dormaient au château dans une aile spéciale leur étant réservée. Ceux qui préféraient dormir dans la nature pouvaient le faire il ne leur en tenait pas rigueur, mais ils étaient tenus de revenir au château le matin pour qu’ils se restaurent ensembles. Kanoë tenait à avoir une armée unie.

C’est par un bel après-midi dégagé qu’il se rendit dans l’aile réservée à ses guerriers, afin de contrôler le moral de ses troupes. Il avait prit l’habitude de se rendre dans leur aile souvent. Même si il ne le laissait pas paraître en gardant un visage neutre et vide d’expression, il se souciait beaucoup du moral de ses guerriers et avait beaucoup d‘affection pour chacun d‘eux. C’est toujours avec un air froid et vide qu’il arpentait les couloirs menant à l’aile des guerriers. Il entra dans le salon de cette aile et aperçu quelques uns de ses soldats. Il s’approcha d’eux et les salua d’un signe de tête. Il ne les saluait de vive voix que très rarement. Toujours impassible, il attendait une réaction de ses fidèles guerriers.

Le capitaine Tarod, allongé près du feu, se remit sur ses pattes et prit apparence humaine pour me saluer à la manière de ceux de sa race. Il était bien que mes guerriers restent fidèle à leur race, ce n’est pas parce qu’il faisaient partit de mon armée qu’ils devaient renier leur peuple. Le chef de troupe Tori Ten’ka qui se trouvait sur le balcon, ferma les yeux et me salua de la tête. Le capitaine Tarod me fixait poliment, une étincelle de curiosité dans le regard. Il est vrai que je n’avais laissé paraitre aucun indice sur la raison de ma visite. Pourtant il ne me posait pas directement la question. C’était peut-être par simple politesse mais je tenais à ce que mes guerriers s’adresse à moi sans aucune crainte tout en me respectant. Une armée sans aucun échange entre le chef et ses guerriers ne peut pas correctement fonctionner.

C’est toujours le visage dénué d’expression que le Prince Kanoë s’adressa à ses guerriers d‘une voix douce et angélique.

« Je tiens à ce que vous vous adressiez à moi sans crainte, et ce quelque soit votre rang au sein de notre armée. La communication est essentielle au sein d’une armée unie. Je veux que vous me fassiez part de vos doutes, de vos craintes, de vos idées. »

Le prince alla s’assoir sur le rebord du balcon, Tarod avait rejoint Tori Ten‘ka.

« Alors, comment vous sentez vous au château? »

J’étais resté assis sur le rebord du balcon et j’écoutais avec attention Tori Ten’ka et Tarod.
L’oiseau de feu s’était installé sur les plus hauts sommets de la montagne. Cela ne me surprit guère, Tori de part sa nature aimait vivre en altitude. Il se justifia tout de même en disant que de là-haut il avait une vue imprenable sur toutes nos terres et qu’il nous préviendrait rapidement en cas d’attaque. C’était un avantage certain, les phoenix avaient la réputation d’avoir la vue perçante ; ainsi, nous ne nous ferions jamais surprendre par l’ennemi. Je regardai le chef de troupe pour lui répondre toujours sur le même ton.

« Je suis sur que tu seras un très bon éclaireur Tori Ten’ka, je sais que je peux avoir confiance en toi. »

Tarod, lui , m’avoua qu’il se sentait à l’étroit au château. En effet les Wolbatas étaient des créatures vivant en pleine nature et non enfermés entre les murs d’un château. Il me demanda s’il pouvait partir vivre dans les plaines et quitter le château. Il jouerait ainsi les éclaireurs et surveillerait les mouvements ennemis. Cela ne m’enchantait guère de laisser le capitaine Tarod seul, proche de l’armée de mon cher frère, et ce malgré ses capacités d’espionnage. Cependant, je sentais qu’il n’était pas à l’aise au château. J’étais donc divisé entre la volonté de garder une armée unie, et ce quelque soit la hiérarchie de ses membres, et le désir que mes guerriers se sentent bien. Il fallait trouver le juste milieu. Tarod me regardait avec respect attendant ma réponse.

« Tarod, je suis conscient que par ta race tu désires vivre en pleine nature et non enfermé à l’intérieur du château. Je ne doute pas de tes talents d’espion, mais je ne peux t’autoriser à épier l’armée de mon frère continuellement. Ce serait trop dangereux. »

Le prince Kanoë marqua une pause avant de continuer.

« Tu as raison, je peux établir un lien télépathique avec chaque membre de cette armée, et si tu as besoin de me contacter il te suffit de prononcer mon nom dans ta tête et penser à ce que tu veux me dire. J’accepte que tu vives en dehors de ces murs mais je tiens à ce que tu reviennes au château au moins une fois par semaine lors de notre rassemblement. Je ne tolérerais pas que la cohésion et l’union entre mes guerriers soit rompues. De plus si je fais appel à toi il faudra que tu nous rejoignes au château le plus rapidement possible. »

Kanoë disait cela mais il savait que Tarod répondrait présent s’il l’appelait. Il avait confiance en ses guerriers et eux avaient confiance en lui.

Le capitaine Tarod semblait heureux que j’ai accepté sa requête. Il avait accepté les conditions, mais ça je n’en doutais pas. Il m’avertit qu’il se rendrait dans les plaines environnantes et qu’il viendrait déjeuner régulièrement au château. J’acquiesçais de la tête. Ainsi, il me sourit et partit en direction des plaines, goûter à sa nouvelle liberté.

Le chef de troupe Tori Ten’ka me remercia et me complimenta sur mes qualités de chef. Il était normal pour un chef de veiller au bien être de ses troupes. L’oiseau de feu me salua et s’apprêta à partir après avoir repéré quelque chose dans les plaines. Je suivis son regard et aperçus au loin un troupeau de cerfs. Il était à peine visible du château. La vue de ce phœnix était vraiment perçante, il n‘éprouverait aucune difficultés à repérer nos ennemis du haut des pics. Je pouvais lire dans ses yeux cette envie, ce désir de chasse. Je soudai rapidement le château. Tous mes autres guerriers étaient à l’extérieur des murs pour la journée. Je n’avais pas de choses urgentes à faire aujourd’hui. Je n’avais pas encore mangé et cette partie de chasse serait un bon moyen de me restaurer, et par la même occasion, un excellent divertissement.
Tori Ten’ka recula et déploya ses larges ailes rouges orangées, prêt à partir. Je sautai du rebord du balcon pour atterrir face à lui. Toujours sans la moindre expression sur le visage, je lui dis.

« Si ça ne te dérange pas, j’aimerais me joindre à ta chasse »

Le phoenix accepta. Il déploya ses ailes flamboyantes et partit en direction du troupeau. Je l’imitai en déployant mes ailes ténébreuses et le suivis. Cette chasse promettait d’être intéressante. J’allais pouvoir observer les qualités de chasseur du chef de troupe.